Les connexions renforcées entre les pays sont l’un des plus grands progrès du XXe siècle, grâce aux voyages en avion. Ceux-ci réduisent les distances et les temps de trajet comme jamais dans l’histoire. Où que nous soyons, un, deux, trois jours suffisent pour atteindre n’importe quel point du globe. Voyager à la vitesse de la lumière, c’est bien, mais cela a un coût. Un coût environnemental, que le voyageur ne paie pas en achetant le billet, mais qui pèse sur l’ensemble des espèces vivantes comme une dette après chaque vol.

Le CO2 et l’aviation

Il ne s’agit pas d’avoir des formules choc, mais de connaître les faits et la science. En voici un aperçu :

Schéma distribution mondiale de la consommation de carburant d'aviation
Distribution mondiale de la consommation de carburant d’aviation – ScienceDirect

De plus les transports maritimes et aériens internationaux sont les seuls secteurs qui ne sont pas inclus dans les plans d’action des États dans le cadre du protocole de Kyoto ou de l’accord de Paris sur le climat

Souvent, nous avançons le fait que le transport aérien ne contribue qu’à hauteur de 3 % environ aux émissions à effet de serre dans le monde. Nous ne tenons pas compte de ses effets radiatifs à court terme. En conséquence, le transport aérien n’est pas la première priorité dans la lutte contre le changement climatique. Compte tenu des autres grandes parts attribuées, par exemple, à l’agriculture ou à la production d’énergie, la limitation des déplacements en avion pourrait ne pas être une priorité.

Ce point de vue est valable si nous considérons les chiffres et les pourcentages actuels. C’est d’autant plus vrai si nous tenons compte des engagements à l’échelle mondiale du transport aérien. L’objectif est de plafonner les émissions au niveau de 2020 (ou plutôt de 2019 dans ce cas) et d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Cependant, en examinant à nouveau les trois points ci-dessus, la situation est complexe. Et elle impacte en particulier les voyages touristiques. 

Voyager en avion est devenu plus accessible

Voyageurs dans un aéropot

Le développement de la classe moyenne dans le monde entier ne fait qu’accroître la demande encore et encore. Si le fait que des populations atteignent des niveaux de revenus stables et confortables est une bonne nouvelle, les normes sociales, les habitudes et l’éducation entraînent une mobilité internationale et des voyages vers des lieux exotiques parmi les plus fragiles. (ces lieux deviennent des endroits à absolument visiter avant de mourir).

En examinant les chiffres, nous constatons qu’une part très limitée de la population mondiale prend l’avion pour aller à l’étranger aujourd’hui.

Mais si cette demande doublait ? Les entreprises résisteraient-elles à cette montée de la demande ? De nouvelles entreprises seraient-elles créées pour y répondre ? Quels seraient leurs engagements en matière de développement durable ? Malheureusement, nous sommes habitués à faire passer les affaires en premier. Une fois de plus, l’être humain se montre incapable de résister aux avantages monétaires à court terme pour sa survie à long terme. Nous avons d’ailleurs déjà constaté que l’explosion de la demande a conduit, sans surprise, à une augmentation massive de l’offre… faisant grimper en flèche les émissions mondiales de l’industrie.

Entreprise, particulier, institutionnel, chacun à un rôle à jouer

Si les entreprises ne sont pas prêtes à résister à la tentation, et l’histoire récente du secteur du transport aérien montre qu’elles ne le sont pas, les particuliers le seront-ils ? Une part essentielle de notre éducation lie le temps à l’argent. Comme le temps est limité, nous devons en profiter un maximum. La capacité de l’avion à comprimer le temps, et donc à éviter de le gâcher, est une chose qui s’ancre profondément dans notre culture. Demander aux gens de changer d’état d’esprit semble une tâche énorme. Mais elle ne prendrait pas moins d’une génération pour que des résultats concrets soient visibles. 

Mais l’impact des actions de chacun et de la pression collective n’est pas négligeable pour autant. Nous voyons des initiatives créatives naître dans le monde entier. Elles abordent la question de la conscience mondiale et de l’importance des actions individuelles. Par exemple, Amsterdam s’efforce d’être la première ville à interdire la publicité pour les combustibles fossiles dans ses rues. Elle s’oppose ainsi aux compagnies pétrolières et gazières, mais aussi aux secteurs connexes, comme les compagnies aériennes).

Les multiples bénéfices du transport aérien

La question du changement climatique trouve de plus en plus d’écho à travers le monde. Nos activités et le transport aérien qui y contribuent s’en trouvent impactés. La limitation des déplacements en avion entraîne des dommages collatéraux importants. L’un des effets secondaires les plus importants est le domaine du tourisme et tous ses acteurs et parties prenantes. Dans un monde pré-COVID, le tourisme représentait environ 10 % de l’économie mondiale, soit 1 emploi sur 10 qui est lié au tourisme et qui en tire profit.

Rhinocéros préservé grâce au apports du transport aérien

Au-delà de son poids économique, le tourisme a des impacts positifs directs sur la société et la culture. Il renforce les liens entre les peuples de différents pays. Il aide au dialogue mondial en embrassant la diversité culturelle et la compréhension mutuelle. Mais il a également des effets incroyablement positifs sur l’environnement.

Pensez à tous les parcs et réserves naturels qui ont permis de remplacer le braconnage par la préservation grâce aux revenus du tourisme. Pensez à la sensibilisation mondiale grandissante vis-à-vis de la biodiversité, de la faune et de la flore grâce à l’éducation et aux expériences des voyageurs sur place.

Conflit de la valeur et des valeurs

Dans le langage courant, nous distinguons ces deux mots. Une valeur étant généralement un prix ou un montant quantifiable, qui est basé sur l’offre et la demande. À contrario, les valeurs sont l’ensemble des règles morales implicites qui ne sont pas, par définition, quantifiables. Les émissions de CO2 sont mesurables, quantifiables et nous pouvons établir une responsabilité. C’est le cas du secteur du transport et de tout son écosystème. S’il est facile de retracer la chaîne d’approvisionnement en carburant, les aéroports et les avions lient le voyage aux loisirs personnels et au tourisme. La valeur réelle du tourisme n’est pas traçable. Ses contributions positives à la société, à la culture et à l’environnement ne sont pas des quantités concrètes mesurables.

Ces deux notions sont difficiles à concilier, surtout en période d’urgence climatique. Nous devons prendre des mesures directes, concrètes et drastiques le plus rapidement possible pour éviter un scénario sombre. Sur le long terme, nous subirons une hausse des températures et un effondrement des écosystèmes et de la biodiversité. Dans ce cas, tout ce qui est considéré comme « accessoire » est relégué au second plan. Voyager en avion à l’autre bout du monde est considéré comme un loisir superflu par une partie croissante de la population. En conséquence, le secteur du tourisme doit faire face à cette tendance. Cette dernière ne devrait pas s’atténuer car le changement climatique est en marche. De plus en plus de personnes commencent à en ressentir les effets dans leur vie quotidienne. 

Se tourner vers l’avenir – les alternatives

De nombreuses alternatives sont en cours de développement, qu’elles proviennent du secteur du tourisme lui-même ou d’autres secteurs. Avec la crise actuelle de COVID-19, il y a eu un essor des offres touristiques locales (dans les pays où la demande est suffisante), ou des offres de séjour près de chez soi qui proposent un nouvel équilibre entre voyages personnels et voyages professionnels. Ou encore l’essor des expériences de voyage en ligne.

De nouvelles formes de mobilités innovantes sont en plein développement. Par exemple, un avion neutre en carbone qui utiliserait du CO2 comme carburant ou un autre carburant non fossile comme l’hydrogène est en cours de conception. En outre, la relation des personnes au travail et l’équilibre à trouver entre vie professionnelle et vie privée sont au cœur des préoccupations. Multipliées dans le monde, elles pourraient entraîner une augmentation du temps consacré aux loisirs, y compris les voyages et le tourisme, et une plus grande flexibilité géographique. Ce sont autant de tendances sociétales auxquelles doit participer activement le secteur du tourisme. Soutenir ce changement est indispensable pour atteindre nos objectifs en matière de développement durable.

Agir ensemble est la solution !

Les sociétés doivent fournir un effort mondial important pour relever le défi du changement climatique. Avant de s’attaquer à un problème, il faut d’abord reconnaître son existence. Comme il est d’une importance vitale pour de nombreux secteurs, le tourisme doit accompagner ce changement global en s’harmonisant avec un large éventail d’acteurs. Des fournisseurs de technologie aux grandes entreprises de transport, en passant par les autorités locales et les décideurs politiques pour contribuer à la nouvelle définition du travail et à la réinvention de notre mode de vie !